Jaws 3D par Romain Néophyte

Même si le légendaire Louis Gossett Jr s’ obstine à refuser mes nombreuses demandes d’ interviews, il est bien évidemment hors de question de passer sous silence son 75ème anniversaire! Espérons, malgré tout, qu’un jour toute la vérité sera faite à propos de son implication dans le classique de Joe Alves! D’ après John Putch (dans un entretien mené par Patrick Jankiewicz), l’ interprète de l’ inoubliable Calvin Bouchard s’ était plutôt bien amusé sur le tournage de Jaws 3D: « He was very fun to be around. Whenever we had a crowd scene with extras, Lou Gossett would start doing his character fron an officer and a gentleman! Lou would look at somebody and do one of his classic lines like Don »t you eyeball me, boy! He did it for fun and we loved it. » Visiblement déçu par le résultat final, Lou a décidé depuis d’ occulter notre film préféré de sa biographie… Vous avez certainement noté la présence d’ une photographie promotionnelle de Louis Gossett Jr pendu au téléphone pour illustrer ce nouvel article (comme l’ année dernière). Et bien sachez que ce cliché (pris d’ un autre angle) est bien plus rare qu’ il en a l’ air puisqu’il est directement issu d’ un jeu de 35mm Slide réservé uniquement au marché européen. Mais revenons à l’ essentiel: HAPPY BIRTHDAY LOU!

Quand la décision fut prise de faire de la seconde séquelle au film de Spielberg un long-métrage en 3D, un test fut immédiatement réalisé par les gens de PSE. « We can’ t really go underwater with 400 people and shoot everything underwater because we don’ t have pressurized compartments » déclare alors le producteur Rupert Hitzig. « So what we do? We composite foreground elements, and we have to greenscreen background elements in 3-D. It’s never been done before. » Dans un premier temps, une poupée Barbie (choisie en raison de sa chevelure) fut donc filmé barbotant dans un aquarium, entourée de poissons, bulles et autres végétations marines. Puis on filma quelques images en 3D de la rue où les locaux de PSE se situaient. Les deux bobines se virent alors combinées à l’ aide de l’ Ultimatte à Ruxton et transférées sur pellicule par Image Transform. Mais c’ est au Tiffany, un cinéma de Los Angeles équipé pour les projections en 3D suivant le procédé  over-and-under que le résultat de ces expérimentations fut projeté. Encore une fois, ce test fut jugé suffisamment bon pour justifier l’ emploi de l’ Electronic Compositing. « Nobody’s ever done 3-D process, which means 3D behind 3D. » confiera Hitzig à la presse. « That’s all going to be a new treat for us to find out if it works. I hope we don’ t end up with 25-foot-long fish that look like minnows.« 

Et une bougie de plus pour notre ami Joe Alves ! Un Joe Alves toujours aussi généreux et disponible qui, depuis le début de l’ année, participe activement au site www.jaws-3d.com . Un an de plus, donc, pour ce réalisateur/ production designer et directeur artistique talentueux que les fans d’ outre-Atlantique pourront rencontrer le 2 juillet prochain à Martha’s Vineyard à l’ occasion de la sortie de l’ ouvrage JAWS: Memories from Martha’s Vineyard de Matt Taylor et Jim Beller. Cette manifestation vous donnera, entre autre, l’ opportunité d’ assister à une lecture du maitre et de vous faire signer votre exemplaire (constitué de 296 pages abondamment illustrées) fraichement acquis (et certainement échanger quelques mots). Imaginez ma tristesse de ne pas participer à un tel évènement… Pour plus d’ informations, visitez le site officiel.  Mais revenons à l’ essentiel et souhaitons à Joe un joyeux 75ème anniversaire!!!

On se souvient tous du « big bitch » de Bess Armstrong et du « goddamm fish » de Louis Gossett Jr… Et bien sachez que l’ ainé des fils Brody s’ était lui aussi laissé aller à quelques gros mots dans une des innombrables séquences coupées de Jaws 3D. Visibles dans l’ indispensable (à défaut d’ être franchement passionnant) making-of Sharks don’t die de Mark Grossan, ces images nous montrent les diverses réactions d’ effroi des personnages principaux suite à l’ apparition surprise de la star du film à la vitre du restaurant The Neptune Room… Premier à remarquer sa présence, Dennis Quaid s’ arrache alors d’ un surprenant « Damned! There’s the bastard right there! » clamé sans grande conviction.Vous l’ aurez compris, cette scène fonctionne bien mieux dans la version cinéma!

Mais je ne peux conclure ce court article sans vous dévoiler un faux raccord passé généralement  inaperçu. Il concerne notre requin préféré qui, lors de cette séquence, porte les marques sur son museau d’ une blessure que Philip Fitz Royce ne lui infligera que bien plus tard… Si jamais un dossier sur les faux-raccords vous intéresse, n’ hésitez pas à m’ en faire part.

« Jaws 3D, that was my first movie, and that was really crazy because I literally knew nothing. I had done like a Burger King commercial and I was really a ballet dancer at the time. So that was kind of crazy because I had to really fly by the seat of my pants. I mean, I had lied and said I had done all these movies. I was kind of terrible. So that’s my first impression… »  La toujours sublime Lea thompson n’ aurait jamais imaginé que ces petits mensonges auraient fait d’ elle, l’ espace de quelques semaines, une skieuse nautique/acrobate compétente… Il est juste regrettable que sa plus spectaculaire performance ait échoué lamentablement sur la table de montage… Visibles dans le making-of Sharks don’t die, ces images plutôt rares ne sont pas pour autant inconnues du grand public puisque ce duo avait déjà eu les honneurs de figurer au verso des différentes VHS allemandes, dans les jeux de lobby cards espagnoles et sur l’ ensemble du matériel promotionnel japonais.

Tout porte à croire que cette scène devait se situer le deuxième jour des évènements des Dents de la mer 3 (le vendredi pour être précis). Elle se déroulait après une autre séquence coupée concernant Kelly Ann Bukowski et Sean Brody (à voir ici)… Difficile cependant d’ identifier à quel moment de la journée, cet entrainement aurait pu avoir lieu. Logiquement, l’ action ne peut se dérouler qu’ aux premières heures de la journée, peu avant la recherche en sous-marin du corps d’ Overman. On voit effectivement plutôt mal Calvin Bouchard (conscient de la présence d’ un bébé requin dans les eaux du lagon) mettre en danger la vie de ses skieurs nautiques même si les décisions de ce dernier ne sont pas toujours des plus raisonnables! Je vous laisse le soin d’ échafauder vos théories… N’ hésitez pas à m’ en faire part.

Terminons provisoirement ce dossier relativement complet sur la trop discrète pieuvre de Jaws 3D en nous focalisant sur les souvenirs de Robert Skotak publiés dans le magazine Filmfax… Robert donnait quelques indices plutôt intéressants sur les séquences coupées au montage qui concernaient le capitaine Sink: « I had a hell of a time lining up every three-dimensional point of the miniature part cave to the live-action version of the same thing, upon which the octopus supposedly sat. Some of the 3-D geometry was extremely hard to replicate from the live-action because often far too few measurement were taken: they were virtually needed for dozens of points to make an accurate match. »

« I think I matched the octopus to the tunnel by using objects in the live-action set whose measurements I could find on blueprints or by counting floor titles visibles in the live action photography on the set- these titles usually one-foot squares- as an after-the fact measuring stick… A couple of these inside-tube angles were chosen so that tentacles came ‘at the camera with interesting 3-D depth perspective -not necessarily out of the screen, but toward the audience to add depht and create a threatening appearance. » Visiblement achevée, cette scène pourrait encore dormir sur les étagères des studios Universal (ou dans la cave d’ Alan Landsburg)… Mais vu le peu d’ engouement que suscite Jaws 3D de nos jours (toujours pas le moindre blu-ray annoncé, rappelons-le) , il ne faudra donc pas s’ attendre à la voir réapparaitre un jour… Pour visualiser l’ attraction sur le plan de l’ Undersea Kingdom, cliquez ici.

Dennis Quaid (ici accompagné de la superbe Bess Armstrong) fête aujourd’ hui son 57 anniversaire. Une occasion de plus de bavarder à propos de son implication dans le projet Jaws 3D… Comme chacun sait, ce troisième épisode est pour Quaid un très mauvais souvenir. Dès le début, le futur interprète de Mike Brody se montra particulièrement sceptique quant aux chances de son personnage de rivaliser avec la technologie 3D, véritable star du film… Rassuré par le producteur Rupert Hitzig, Quaid se lança enfin dans l’ aventure et en profita pour approfondir ses connaissances sur le monde fascinant des requins: « There is a lot of hatred toward the shark. He’s a monster. He’s mean. He’s a killer. Well, last year in the world there were 35 sharks attacks, only two of them fatal. The truth is, a shark will not attack you just for the hell of it. But as monsters, in movies like this, they work well because they’re so prehistoric, seeming not to comprehend when they kill…They are big, they have a small brain. They are killing machine. » déclara-t-il à la presse en mai 1983 prouvant le sérieux de ses recherches…. Un travail en amont qui lui a peut-être permis d’ éviter la nomination aux Razzies Awards… Mais bon, revenons à l’ essentiel: l’ anniversaire de notre ami Dennis Quaid! Happy Birthday!!!

« Romain, je suis passionné par les pieuvres depuis ma plus tendre enfance. J’ espère sincèrement trouver sur ton site de quoi soulager ma soif de connaissances! ». Tu as frappé à la bonne porte, mon ami Carlo. Comme tu l’ as certainement remarqué en arrivant sur ton site préféré, cette seconde partie du dossier consacré au Captain Sink est plutôt généreuse en illustrations. La plupart d’ entre elles sont issues de magazines d’ époque (Cinefantastique, American cinematographer…) mais aussi des archives personnelles de la très sympathique Danielle Versé… Profitons donc sans plus tarder du magnifique cliché couleur sur notre gauche qui nous montre le caméraman George D.Dodge (Terminator 2, New York 1997) de PSE en train de manipuler une des tentacules de notre monstre chéri devant le désormais légendaire écran vert de Jaws 3D.

Au tour de la responsable des miniatures, Danielle Versé, de donner vie à cette petite merveille. A ses côtés, on aperçoit Eric Visser dont la carrière ne semble pas avoir profité de cette expérience puisque l’ on ne trouve aucune trace de lui sur la toile… Les trois documents suivants nous donnent, quant à eux, l’ occasion de voir la bête sous toutes ses coutures ainsi que d’ autres membres de la compagnie PSE au travail. Sur le premier, la jeune artiste d’ origine belge Danielle Versé s’ improvise marionnettiste (poste occupé entre autre par le spécialiste des effets visuels Dennis Skotak visible au fond) et semble en tirer une grande satisfaction… Michael Novotny (directeur artistique sur True Lies) déjà responsable de la végétation composant le sol de l’ Undersea Kingdom fait lui aussi partie de l’ équipe technique chargée d’ animer les tentacules de la pieuvre géante.

Une pieuvre géante dont le souci du détail devrait impressionner les plus blasés d’ entre vous. Reste à connaitre l’ importance de cet accessoire dans les premières versions du film de Joe Alves. La dernière partie de ce dossier tentera d’ apporter quelques éclaircissements à ce sujet. De quoi rendre heureux notre ami Carlo…

Rares sont les films dont la majeure partie du matériel coupé au montage concerne des séquences à effets spéciaux. Contre toute attente, Jaws 3D appartient à cette catégorie… Et la principale victime de ces innombrables changements de script et remontages sauvages n’ est autre que le capitaine Sink. A peine visible à l’ écran (2 plans presque subliminaux), cet élément du décor de l’ Undersea Kingdom avait fait preuve d’ une attention toute particulière de la part du personnel de PSE. S’ inspirant certainement de la pieuvre géante de 20 000 lieux sous les mers (à moins qu’ il s’ agisse plutôt de Tentacules de Ovidio G. Assonitis…) , Captain Sink apparaissait déjà dans le premier jet signé Richard Matheson.

Sur la base d’ un dessin préparatoire réalisé par l’ artiste Jay Roth, une sculpture du céphalopode au 1/24ème est rapidement confectionnée pour quelques plans sous-marins de l’ Undersea Kingdom. Comme vous l’ avez certainement remarqué, ce modèle (en photo ci-dessus) diffère légèrement de l’ illustration en N&B parue dans numéro 125 de Filmfax. Exit donc ce corps mou imposant qui donnait au mollusque un véritable look d’ arachnide (pour le moins effrayant) et place au monstre « familiale » dans la plus pure tradition Disney!

Mais pour répondre aux attentes de la production, une pieuvre complètement articulée (aux dimensions plus généreuses) devra être tout de même  fabriquée par les hommes de Chuck Comisky. En effet, le script annonce une séquence particulièrement impressionnante (justifiant pleinement l’ utilisation de la 3-d) où les bras recouverts de ventouses  du monstre viennent titiller le  pauvre spectateur! Pour parvenir à cet effet, de nombreux techniciens seront visiblement réquisitionnés comme semble l’ indiquer ce dessin schématique tiré des archives de PSE. Car c’ est bien sous la forme d’ une marionnette filmée devant un écran vert que le Capitaine Sink fera sa grande apparition à l’ écran!

Avec son étrange concept « mechanical people/ real sharks« , le retour du requin brulé du film de Szwarc, son utilisation abusive de Stock-shots issus des archives d’ Alan Landsburg et l’ arrivée de l’ « Electronic Compositing« , Jaws’ 81 a tout du projet bancal. Tellement bancal que Verna Fields (alors exécutive à Universal) contacte Joe Alves en octobre 81 pour lui faire part de ses craintes: »Oh, Jaws… What a mess. Please go over there and see what you can do to save the project. The studio’s not really interested but we don’ t want it to be a mess! »

Contrairement à ce qu’ on pourrait imaginer, Joe n’ était pas au courant de la mise en chantier d’ un troisième Jaws (rebaptisé depuis peu Jaws’ 82). Et l’ étonnement fut particulièrement grand quand il apprît que les droits appartenaient désormais à un producteur TV: « I was very surprised when I heard about it, but I wasn’t aware of it until 1981 because I was involved in making other movies. It was brought to my attention my Verna Fields« .

Verna Fields arrange donc immédiatement un rendez-vous à Los Angeles entre Alves et Landsburg. Au cours de l’ entretien, ce dernier propose au fidèle collaborateur de Steven Spielberg (alors âgé de 45 ans) d’ assurer la production. Mais c’ est le passage derrière la caméra qui semble avant tout l’ intéresser. Pour autant, Joe Alves n’ est pas prêt à à se soumettre à toutes les excentricités de son futur employeur. La questions des stock-footages et des marionnettes est même abordée: « I told Landsburg that I thought is was absolutely absurd and that we had to build a shark ». Alan Landsburg, sceptique quant aux capacités de Joe Alves à diriger une production de plusieurs millions de dollars (alors que Joe a dirigé la seconde équipe sur Jaws 2 pendant près de 100 jours…) , le convainc tout de même de travailler avec Richard Matheson (qui vient d’ achever une première version du script sans les fils Brody mais avec Mickey Rooney) le temps qu’ une décision soit prise. La suite, vous la connaissez…